Al-Qaida et la menace nucléaire: un mythe selon Alain Chouet, ex-directeur du Service de renseignement de sécurité à la DGSE

Mise à jour du 4/05/2010

Suite à la parution de cet article, M. Alain Chouet nous a demandé par email de faire paraître le commentaire suivant. Nous tenons à préciser que les propos de Mr Chouet avaient été rapportés tels qu’ils apparaissaient dans les échanges d’emails entre lui et le membre de notre association qui l’avait contacté, et que notre intention en publiant cette ReOpenNews ne fut jamais de déformer ses propos. La seule imprécision fut de lui demander la permission de publier ses propos sur notre site, sans indiquer que ce site était ReOpen911.info. Nous précisons qu’à aucun moment nous n’avons insinué de quelque manière que ce soit que M. Chouet infirmait la version donnée par le Gouvernement Bush sur les attentats du 11 septembre 2001, et saluons son courage pour avoir osé donner un son de cloche divergent sur al-Qaïda depuis 2002. 

 

Mise en garde contre l’utilisation de mes propos par des sites "conspirationnistes"

Ceux qui prennent la peine de consulter [mon] site comprendront que je ne remets aucunement en doute la matérialité des attentats du 11/09/2001, que ce soit contre les Twin Towers ou le Pentagone, par l’utilisation d’aéronefs détournés. 
De même, je ne remets aucunement en doute le fait  que ces attentats ont bien été perpétrés par un groupe d’une vingtaine d’individus endoctrinés et actionnés  par le tandem Oussama Ben Laden-Ayman Zawahiri et qui ont profité des failles des systèmes de sécurité aéroportuaire américains à l’époque. 
C’est en se fondant sur ma critique de ce que je considère comme des erreurs commises par l’administration américaine dans le traitement du terrorisme djihadiste international que certaines personnes confisquent mon discours (toujours de façon tronquée et hors contexte et, évidemment, sans jamais me demander mon avis) pour étayer des thèses conspirationnistes  au sujet des attentats du 11 septembre. Je désapprouve vigoureusement ces thèses et leurs auteurs. 
Je laisse à ces personnes la responsabilité de leurs propos auxquels je n’entends donner aucune caution ou approbation.

A.Chouet

 

 


 

Suite aux déclarations du Président américain sur al-Qaida qui tenterait d’acquérir la bombe nucléaire (repris par le Nouvel-Obs), nous nous sommes permis de contacter Alain Chouet, ex-directeur du Service de renseignement de sécurité à la DGSE (Services secrets français) de 2000 à 2002, qui a bien voulu nous donner un avis sur nos interrogations.

Le contexte : Lors d’une récente intervention à la conférence sur les dangers de terrorisme nucléaire, Barack Obama a déclaré : "Nous savons que des organisations comme Al-Qaïda sont en train d’essayer d’obtenir une arme nucléaire, une arme de destruction massive qu’elles n’auront aucun scrupule à utiliser".

Ces insinuations sont extrêmement graves. Pure propagande ou danger réel ? Qu’en est-il vraiment ? Voici donc l’opinion d’Alain Chouet, dont nous avions déjà évoqué l’intervention devant une commission du Sénat en janvier dernier, au cours de laquelle il déclarait qu’al-Qaida était morte en 2002 sous les bombardements américains de Tora-Bora[1].

 

Alain Chouet ne croit pas à la menace nucléaire par al-Qaida

 


 

Échanges avec Alain Chouet, ex-chef du renseignement à la DGSE

Paris, le 19 avril 2010

 

Reopen911 : La presse raconte qu’Al-Qaïda serait en train de tenter d’obtenir (voire de fabriquer ?) des engins nucléaires de destruction de masse. Clinton et Obama semblent sûrs d’eux et une nouvelle fois le dindon semble être ben Laden source de tous les maux de la Terre. Que pensez-vous de ces nouvelles déclarations publiques ?

A.Chouet : Fabriquer un engin nucléaire opérationnel ne me paraît pas dans les capacités des réseaux jihadistes actuels. Je les vois mal réussir au fond de leurs grottes miteuses là où des puissances nationales immenses, dotées de ressources financières importantes et d’un substrat technologique développé ont mis des années à fabriquer de tels engins.

Acquérir un engin tout fait reste possible, mais se pose le problème de l’entretien. Les isotopes utilisés dans les engins nucléaires ont une durée de vie "efficace" limitée. Les bombes atomiques, comme les yaourts, doivent être consommées frais. Sinon elles ne détonnent pas et se transforment au pire en "bombes sales" . Donc, passés quelques mois il faut renouveler le coeur. Ce qui ramène au premier problème.

Enfin se pose le problème des vecteurs. Comment apporter l’engin à l’endroit voulu et le mettre en oeuvre ? L’histoire des "valises" est une plaisanterie. Des engins "miniaturisés" existent, mais leur transport doit s’effectuer sous des protections assez massives et leur mise en oeuvre exige des personnels hautement qualifiés. Cela ne peut voyager ni en avion civil ni à dos de chameau.

Tout cela ne me paraît donc pas très sérieux sauf à imaginer une faillite totale des systèmes de sécurité et de surveillance occidentaux…

L’hypothèse d’une "bombe sale" (explosif classique dispersant des produits hautement radio-actifs et toxiques – les transuraniens sont en général des poisons violents) me paraît beaucoup plus sérieuse, surtout si les terroristes ne sont pas trop regardants sur la sécurité des servants. L’effet opérationnel réel ne serait peut-être pas très grand, mais l’effet psychologique serait dévastateur. Mais là encore se pose le problème du transport sur site de l’engin sans affoler tous les systèmes de sécurité. Les ressources éventuellement disponibles pour ce genre d’engin se trouvent essentiellement en Russie, dans certains pays d’Asie centrale et au Pakistan. Il faudrait quand même leur faire parcourir entre 5 et 10000km pour les apporter sur un site significatif.

Compte tenu des derniers "exploits" plus ou moins miteux du djihadisme international, sans exclure aucune hypothèse, celle d’un terrorisme nucléaire ne me paraît pour l’instant pas avoir beaucoup de consistance. C’est donc plutôt sur la stratégie et les motivations de ceux qui agitent la menace qu’il faut s’interroger. Il est vrai que, principe de précaution oblige, ils n’ont pas le droit de faire l’impasse sur l’hypothèse, mais il faut savoir raison garder.

 
ReOpen911 : Nous permettez-vous de publier vos propos ?

A.Chouet : Mes remarques n’ont rien de bien savant ni de bien original. Elles relèvent du simple bon sens. Faites-en ce que vous voulez. J’observe cependant que ceux qui hurlent aujourd’hui au loup sur ce sujet sont les mêmes qui affirmaient sans l’ombre d’une réserve que Saddam Hussein possédait des WMD [armes de destruction massive] en 2003. Je n’avais aucune sympathie pour le dictateur irakien et le monde est évidemment meilleur sans lui. Mais on ne l’a pas éliminé pour les bonnes raisons. En tant qu’homme de métier, je trouve ça grave. Et – au-delà des incantations – je ne vois pas clairement de preuve ou d’indice probant de ce que l’on affirme aujourd’hui sur le "nucléaire djihadiste". Si vous en avez, je suis preneur.
Bien à vous.
A. Chouet 

 

Propos recueillis par Kikujitoh pour ReOpenNews

 


Références ReOpenNews

  1. Lire notre article « La Qaïda est morte dans les trous à rats de Tora Bora en 2002 », paru le 19 mars 2010

 

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9 Responses to “Al-Qaida et la menace nucléaire: un mythe selon Alain Chouet, ex-directeur du Service de renseignement de sécurité à la DGSE”

  • nicoloco

    bravo les ptits loups, bravo, enfin un peu de bon sens a divulguer … commencez à le rapporter à la presse régionale… bravo encore

  • Gavrouchka

    Ce type est passionnant ! Je pense que, puisqu’Alain Chouet nous donne toute liberté d’utiliser cette interview, Reopen pourrait la traduire et la poster sur 911blogger ou 911truth.
    Je suis éventuellement dispo pour la traduire en Anglais.

  • Quand même

    … »C’est donc plutôt sur la stratégie et les motivations de ceux qui agitent la menace qu’il faut s’interroger »…

    En effet, ces affirmations (qu’Al Qaeda se procure du nuclaire) sans doûte fabriquées pourraient faire partie d’un projet pour une nouvelle opération sous-fausse bannière à grande échelle du style 11/9 qui pourrait encore coûter la vie à de milliers de personnes voire plus.
    Malheureusement tout le monde ne s’informe pas sur des sites comme ReOpen et la majorité des gens croiraient à la mise en scène d’un attentât nucleaire par l’entité nébuleuse nommée « Al Qaeda ».

  • Max

    A une certaine époque l’on a donné des griffes à al Quaida, (debut 2001 en justice au US) mais il ne faut pas oublier :

    La naissance d’Al-Quaïda par Pierre-Henri Bunel.
    (Officier d’artillerie, officier retraité des services de renseignements de l’armée française)

    Toutes les sessions de la Conférence Islamique donnent lieu à des relevés de décisions comme toutes les réunions destinées à servir à quelque chose. Pour mettre sur pied les ordres du jour, il fallait au début de l’histoire de l’Organisation de la Conférence Islamique de longues tractations entre les représentants des pays membres. Ces débats avaient lieu à Djeddah, siège du secrétariat de l’OCI, ou dans d’autres villes de pays musulmans. Au prix de longs tâtonnements, les gouvernements échangeaient des informations et des données visant à déterminer l’urgence et l’importance des points à traiter.

    Or, en même temps qu’ils ont créé l’organisation de la Conférence islamique, les pays fondateurs ont mis sur pied la Banque Islamique de Développement. On n’est pas encore à la grande heure de l’Internet, mais les banques ont déjà des moyens de communication performants en mesure de transmettre des fichiers informatiques et les ordinateurs capables de stocker des informations sous la forme de banques de données accessibles à distance. Il s’agit d’un intranet avec toutes ses fonctionnalités.
    Pendant mon stage à l’école de guerre de Jordanie, en 1985-86, j’apprends un mot arabe que les officiers ne remplacent pas par son équivalent anglais de « data base ». Il s’agit du mot Qâeida-t-ulmuetiyât, qui veut dire lui aussi « la base de données ». Comme nous n’avons pas d’ordinateurs à notre disposition, je m’intéresse à cette fascination pour ce mot venant du vocabulaire de l’informatique. Et c’est Shakeel Tarmuzy, notre condisciple pakistanais, qui me « met au parfum ».

    L’Organisation de la Conférence Islamique a décidé d’utiliser les moyens modernes de la Banque Islamique de Développement pour préparer ses réunions et pour communiquer ses décisions. Si les comptes rendus des réunions sont toujours édités dans différentes langues, il faut de plus amples renseignements aux fonctionnaires des États membres pour « coller » aux lignes directrices de la politique islamique élaborée ensemble.

    Pour cela, toute une partie des mémoires de la Banque Islamique de Développement a été annexée au profit de la Conférence. On peut y accéder si l’on y est abonné, et alors, sur l’écran de son ordinateur, on peut lire les informations dont on a besoin. Tout est acheminé par un simple réseau téléphonique et les ambassades et gouvernements des pays membres sont abonnés au système.
    Ce réseau s’appelle Al Qâeida. La base. Et ce mot a de nombreux sens comme en Français. C’est la base militaire, mais c’est aussi la base en chimie, comme la soude, par exemple. Et bien sûr c’est la base de données, en informatique. D’après ce que j’apprends au stage de l’école de guerre, on peut, si l’on est abonné, consulter deux bases : Qâeida-t-ulmaeloumât, la base [de données] d’informations et Qâeida-t-uttaelimât, la base [de données] des instructions, des directives.

    Les officiers jordaniens font parfois référence à ce système en plaisantant. Par exemple, lorsque quelqu’un arrive un peu en retard au bus, en fin de service, on lui dit : « Attention, tu vas te retrouver dans la base d ’informations » sous-entendu, on va te signaler. Quand la plaisanterie se veut plus menaçante, on parle au « délinquant » de la base des instructions ou directives. Là, cela veut dire qu’une décision de sanction va être prise à son encontre. Et si la menace est au plus fort, on ne lui parle pas de Qâeida-t-ulmuetiyât, la base de données qui réunit les deux, mais simplement de Al Qâeida. C’est plus court.

    Jugez de mon étonnement, quand après avoir passé plus de dix ans au contact d’une partie des différentes branches du terrorisme islamique, je découvre que les « cols blancs » de la CIA ou du FBI, ceux qu’on ne voit jamais sur le terrain, nous affirment doctement que le terrorisme islamiste est le fait d’une seule armée de l’ombre, dûment organisée et centralisée, sous le commandement d’un chef emblématique, barbu comme un imam de banlieue des années 80, Ussama bin Lâdin, et que cette armée s’appelle Al Qâeida.

    Al Qâeida, quelle aubaine !

  • CD

    Il y a de quoi réfléchir quand on lit l’adjectif « conspirationnistes » ici:

    « Mise en garde contre l’utilisation de mes propos par des sites « conspirationnistes »"

    Il est indispensable de savoir et de reconnaître ce qui est commun à l’hypothèse du terrorisme d’Etat et à la Théorie du complot, parce qu’il est indispensable de savoir ce qui distingue définitivement les deux sur le plan logique.

    Si on est capable de faire clairement cette démonstration, l’interlocuteur ne peut pas qualifier ReOpen911 de site « conspirationniste » et se trouvera obligé de sous-estimer la valeur des informations que le site s’échine à donner s’il veut maintenir sa position sur le terrain des faits.

    Or l’on ne peut pas indéfiniment sous-estimer ces informations puisque non seulement nombre d’entre elles suffisent prises une à une mais surtout leur multiplication est intenable.

    Vous êtes donc le bienvenu, cher Monsieur Chouet, pour prolonger votre échange avec l’association.





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