Union Européenne et guerre au terrorisme : L’heure de l’examen de conscience ?
Sans aller jusqu’à remettre en cause la politique européenne en matière de lutte antiterroriste, cette résolution de la Commmission parlementaire sur les libertés civiles diffusée mi-juillet a le mérite de poser clairement la question du coût et des conséquences pour le citoyen européen de 10 ans de guerre contre le terrorisme. Insistant sur le fait que "la politique antiterroriste doit correspondre aux menaces terroristes et se baser sur des preuves et non des suppositions", cette résolution invite la Commission européenne à mieux prendre en compte le droit des victimes et la protection des données personnelles, et demande aussi à chaque État de faire son propre bilan et de clarifier le rôle qu’ils ont tenu lors du programme des "restitutions extraordinaires" de la CIA.
Les attentats d’Oslo survenus 10 jours après le vote de cette résolution vont-ils changer la donne ? Cette résolution n’est-elle qu’un énième coup d’épée dans l’eau, ou bien assistera-t-on à un véritable examen de conscience des pays européens et à une démarcation de cette guerre au terrorisme initiée voilà bientôt 10 ans par l’Administration Bush sur les cendres de Ground Zero ?
Session du Parlement européen à Bruxelles
La politique antiterroriste a besoin d’une évaluation appropriée
sur le site Web du Parlement européen, le 14-07-2011
COMMUNIQUÉ DE PRESSE
Commission: Libertés civiles, justice et affaires intérieures
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La politique antiterroriste doit correspondre aux menaces terroristes et se baser sur des preuves et non des suppositions, selon une résolution adoptée par la commission des libertés civiles mardi 12 juillet. Les députés demandent une évaluation appropriée des mesures prises en vue de combattre le terrorisme en Europe depuis le 11 septembre et invitent instamment la Commission européenne à présenter une étude sur le coût de la politique antiterroriste.
La résolution a été approuvée par 29 voix pour et 24 voix contre. Les groupes PPE, ECR et EFD ont voté contre.
Dix ans après que les attentats du 11 septembre 2001 au World Trade Center aient déclenché une "guerre contre le terrorisme", la politique antiterroriste doit faire l’objet d’une évaluation adéquate, en particulier pour déterminer si les mesures qui ont été prises étaient basées sur des preuves ou sur de simples suppositions, estime la commission parlementaire.
"Les politiques antiterroristes devraient répondre aux normes concernant la nécessité, l’efficacité, la proportionnalité, les libertés civiles, l’état de droit, et le contrôle et la responsabilité démocratiques. Une évaluation en profondeur et complète des mesures européennes actuelles en matière d’antiterrorisme se fait attendre depuis longtemps et débouchera sur des politiques plus efficaces. Une étude des coûts supportés par le secteur privé est également nécessaire", a déclaré le rapporteur, Sophie in’t Veld (ADLE, NL), après le vote.
Les députés soulignent que les mesures antiterroristes doivent correspondre au niveau des menaces, et être ajustées en fonction de celui-ci. La commission parlementaire appelle la Commission européenne à dresser un aperçu des différentes politiques antiterroristes existant en Europe, aux niveaux européen et national, en vue de servir de base à l’évaluation.
Coût des mesures antiterroristes
La Commission européenne est invitée à présenter un rapport détaillé sur l’ensemble des fonds européens utilisés pour lutter contre le terrorisme, tels que les dépenses pour le personnel et les agences de l’Union qui effectuent des missions antiterroristes, ainsi que pour les systèmes et bases de données informatiques. La Commission devrait également présenter une analyse de l’évolution du budget de l’Union en la matière depuis 2001, selon la commission parlementaire.
Cette dernière invite la Commission européenne à réaliser une étude des coûts des politiques antiterroristes supportés par le secteur privé, ainsi qu’un relevé des secteurs qui bénéficient des politiques antiterroristes.
Programme des restitutions extraordinaires de la CIA et Guantanamo
Selon la résolution, l’Union et ses États membres doivent établir clairement quel a été leur rôle dans le programme des restitutions extraordinaires de la CIA, au vu des nouvelles preuves révélées dans ce domaine. Les députés affirment également que l’UE doit aider les États-Unis à résoudre la question de la fermeture du centre de détention de Guantanamo et à garantir un procès équitable aux prisonniers.
Droits des victimes et protection des données
La commission attache une attention spéciale aux victimes du terrorisme et est d’avis qu’un ensemble uniforme de règles doit être défini en vue de protéger et de soutenir les victimes du terrorisme, notamment les témoins.
Les députés soulignent la nécessité d’améliorer l’utilisation des données à des fins antiterroristes. Pour ce faire, la Commission devrait présenter une proposition de législation sur la protection des données, qui devrait également s’appliquer au cadre de la politique étrangère et de sécurité commune, ajoutent-ils.
Radicalisation et recrutement
Les politiques de lutte contre le racisme et les discriminations représentent des outils essentiels pour prévenir et lutter contre la radicalisation et le recrutement de terroristes potentiels, qui représentent "la menace principale à long terme", souligne la résolution.
Sous la présidence de: Juan Fernando López Aguilar (S&D, ES)
Rapporteur: Sophie in ‘t Veld (ADLE, NL)
Procédure: résolution d’initiative
Vote en plénière: septembre I
En lien avec cet article :
- Guerres étasuniennes : le coût | par Maurizio Matteuzzi, pour ilmanifesto.it, le 1er juillet 2011
- Vols secrets de la CIA: requête déposée devant la Cour suprême des USA | (©AFP / 09 décembre 2010 17h58) relayé par Romandie.com
- Terrorisme, la CIA cache un secret à Vilnius | par Giulietto Chiesa, La Stampa, 23 décembre 2009
- Au mépris de l’Europe et du droit. L’archipel des prisons secrètes de la CIA | par Giulietto Chiesa, Le Monde Diplomatique | août 2006
Les belles promesses n’engagent que ceux qui les écoutent…
Ça commençait bien mais la fin arrive comme une douche glacée : « Les politiques de lutte contre le racisme et les discriminations représentent des outils ESSENTIELS pour prévenir et lutter contre la radicalisation et le recrutement de terroristes potentiels, qui représentent « LA MENACE PRINCIPALE à long terme », souligne la résolution. » (je souligne). Les rédacteurs ne semblent pas connaître les chiffres d’Elias Davidsson concernant la mortalité du terrorisme naturel, c’est-à-dire une fois exclu le terrorisme d’État ( http://www.iceberg911.net/davidsson-1.html ) : ils sont dérisoires comparés à ceux du terrorisme d’État et relèvent essentiellement de luttes d’indépendance (Espagne, Irlande du Nord). Par conséquent on voit mal en quoi lutter contre le racisme et les discriminations sera efficace, mais on voit très bien en revanche qu’il est ici question de perpétuer le mythe du méchant religieux fanatique, automatiquement musulman par les temps qui courent. Tout ça pour en revenir à ça…
On est heureux de voir la Commission appeler de ses voeux la fermeture de Guantanamo, par contre elle reste prudente sur les restitutions extraordinaires pour lesquelles seule une exigence de TRANSPARENCE est formulée (pour l’instant ?).
Quant à Oslo, il est évidemment permis de le voir comme un EFFET du choc des civilisations, impulsé par le terrorisme d’État de l’ère Bush, les naïfs finissant par croire à la réalité de la menace islamiste radicale.