Amnesty International : Trois choses à savoir sur le film « Zero Dark Thirty » et sur la torture
Image du film non incluse dans l’article original
Le film "Zero Dark Thirty" sur la traque ayant mené à retrouver Ben Laden laisse entendre que la torture avait pu contribuer à fournir des éléments utiles pour le retrouver « La question n’est pas de savoir si la torture fonctionne ou pas. La question est de savoir si la torture est acceptable ou non. Et la réponse est que la torture est inacceptable. »
De Zeke Johnson, directeur de la campagne Pas de sécurité sans droits humains à Amnesty International USA
Le 23 janvier 2013 sur Amnesty International
Après avoir vu le film Zero Dark Thirty, je pense qu’il y a trois choses que tout le monde devrait savoir :
1. Zero Dark Thirty n’est pas un documentaire. Le scénariste du film, Mark Boal, a déclaré : « Il s’agit d’une fiction. Ce n’est pas un documentaire… Je ne suis pas dans une logique journalistique visant à une "citation mot pour mot". Je ne souhaite pas qu’on me prête un tel niveau d’authenticité et je n’ai certainement pas voulu qu’on perçoive mon film de cette manière. Ma logique est plutôt la suivante : "Mon approche est-elle à peu près réaliste ?" »
2. La torture n’a pas facilité la capture d’Oussama ben Laden. Cela apparaît dans les données publiques officielles et a été vérifié par des personnes ayant accès aux informations classifiées du gouvernement américain. Par exemple, hier, le sénateur républicain John McCain (Arizona), la sénatrice démocrate Dianne Feinstein (Californie) et le sénateur démocrate Carl Levin (Michigan) ont envoyé cette lettre au directeur de Sony Entertainment, dans laquelle ils incluaient des citations prouvant que la torture et les autres formes de violences n’ont pas contribué à trouver Oussama ben Laden.
3. Le point le plus important est le suivant : la torture est immorale, toujours illégale, et jamais permise. La torture et les mauvais traitements sont explicitement interdits par la Constitution des États-Unis et par le droit international. Aucune dérogation ni aucune circonstance exceptionnelle ne peuvent être invoquées pour justifier la torture ou les mauvais traitements. Le sénateur républicain Jim Risch (Idaho) l’a formulé de cette manière.
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LIRE AUSSI
- Rapport (en anglais) : "USA: Truth, justice and the American way? Details of crimes under international law still classified Top Secret"
AI Index : AMR 51/099/2012 – 19 décembre 2012
- Rapport : "États-Unis. Guantánamo : une décennie d’atteintes aux droits humains"
AI Index : AMR 51/103/2011 – 16 décembre 2011
- L’article "Guantánamo : 10 années de torts causés à des êtres humains" novembre 2012
En lien avec l’article :
- Communiqué d’Amnesty sur Guantanamo : 10 années de torts causés à des êtres humains, par Amnesty International le 14 novembre 2012.
- Amnesty International s’interroge sur la mort d’Oussama Ben Laden, par l’AFP le 25 mai 2012.
- Guantanamo : Le témoignage de Lakhdar Boumediene resté prisonnier 7 ans sans procès ni inculpation, par Europalestine le 11 janvier 2012.
- Communiqué de Presse d’Amnesty International : Guantanamo, une décennie d’atteintes aux droits humains, par Amnesty International le 11 janvier 2012.
- La Finlande va fournir des informations sur des vols suspectés de la CIA, par l’AFP le 6 novembre 2011.
- Ottawa rejette la demande d’Amnesty International d’arrêter Bush, par le Vancouver Sun le 14 octobre 2011.
- Amnesty International : Le Canada doit arrêter et poursuivre George W. Bush, par Amnesty International le 12 octobre 2011.
- Prisons secrètes de la CIA : AMNESTY demande à la Lituanie de rouvrir l’enquête, par Amnesty France le 5 octobre 2011.
- Les autorités suisses doivent enquêter sur W. Bush (qui annule sa visite à Genève), par Amnesty Belgique le 6 février 2011.
- Ouverture d’une information judiciaire à l’encontre de G. W. Bush ?, par Amnesty Suisse le 13 novembre 2010.
- La Lituanie reconnaît l’existence d’une prison secrète, par Amnesty International le 21 mai 2010.
D’après le rapport intitulé « De la mondialisation de la torture » de l’organisation Open Society Justice Initiative publié mardi 5 février :
« En participant à ces opérations, ces gouvernements ont violé aussi le droit intérieur et international et ont sapé les règles contre la torture », qui est « non seulement illégale et immorale mais aussi inefficace pour réunir des renseignements fiables »
http://www.lemonde.fr/international/article/2013/02/05/prisons-secretes-54-pays-ont-collabore-avec-la-cia_1827569_3210.html
Rappelons que Khalid Sheik Mohamed (qui a avoué être « responsable de l’opération 11-Septembre, de A à Z ») a subi 183 fois la technique « waterboarding » selon le New York Times qui cite une note du ministère de la Justice datant de 2005. Le journal ajoute que cette technique consistant à infliger un simulacre de noyade par des interrogateurs de la CIA a été employée sur un autre membre présumé d’Al-Qaïda, Abou Zoubaydah, qui a été interrogé de la sorte à 83 reprises.
http://tempsreel.nouvelobs.com/actualites/ameriques/20090420.OBS3940/183_waterboarding_pour_le_cerveau_du_11_septembre.html
Et selon un article du Figaro du 24 08 2009 :
« Après l’aveu par George W. Bush en 2006 de l’existence de ce programme secret et la découverte ultérieure d’abus considérés par la nouvelle Administration américaine comme des actes de torture, le magazine Newsweek révélait vendredi sur son site des témoignages anonymes de personnes au fait de ce rapport, décrivant des pratiques ignorées jusqu’à présent : l’emploi d’un pistolet et d’une perceuse électrique braqués sur un des chefs d’al-Qaida et un simulacre d’exécution pour le faire parler. De telles méthodes, assimilées à des menaces de «mort imminente», sont interdites par la loi américaine. »
http://www.lefigaro.fr/international/2009/08/24/01003-20090824ARTFIG00348-le-rapport-qui-met-en-cause-les-methodes-de-la-cia-.php
Dans un article d’ABC News du 18 novembre 2005, Brian Ross et Richard Esposito détaille la technique du waterboarding :
« Le prisonnier est attaché à une planche inclinée, les jambes levées et la tête légèrement plus basse que les pieds. On lui enveloppe la tête de cellophane et de l’eau lui est versée dessus. Inévitablement, les réflexes de suffocation s’enclenchent et une peur panique de la noyade force le prisonnier à supplier que l’on arrête le traitement. D’après nos sources, les officiers de la CIA qui se sont soumis à la technique du water boarding ont résisté en moyenne 14 secondes avant de craquer. Ils rapportent que le prisonnier d’Al-Qaida le plus dur, Khalid Cheikh Mohammed, s’est attiré l’admiration des interrogateurs en résistant entre deux minutes et deux minutes et demi avant de supplier qu’on le laisse parler. « La personne croit qu’elle est en train de se faire tuer, ce qui équivaut à un simulacre d’exécution, ce qui est illégal d’après les lois internationales », dit John Sifton de Human Rights Watch. »
http://abcnews.go.com/WNT/Investigation/story?id=1322866
Et pas la peine d’employer une méthode aussi extrême et barbare que le waterboarding ou de menacer d’utiliser une perceuse électrique pour obtenir des « aveux » :
Slate – 24 02 2012 :
« (…)Les études faites sur 224 personnes ont montré que les innocents passaient aux aveux pour éviter des effets à court terme, en oubliant ceux à long terme, pour ne pas subir une liste interminable de questions ou rencontrer un officier de police juste après l’interrogatoire notamment:
«Les auteurs de l’étude émettent la théorie que des suspects innocents croient si fortement que la vérité sera éclatante et qu’elle sortira, qu’ils pourraient percevoir les conséquences distales, comme la condamnation, la prison, comme distantes et peu probables.»
En France, la cour d’assises des Hauts-de-Seine a cherché mardi 21 février, à comprendre pourquoi Marc Machin avait avoué en 2001 le meurtre de Marie-Agnès Bedot, avant d’être innocenté par le vrai coupable 7 ans après son incarcération selon Libération:
«Il m’a pris à part, m’a offert un chocolat chaud, un paquet de cigarettes et il m’a dit « vas-y soulage ta conscience », explique Marc Machin. Je pensais que j’allais être remis en liberté après les expertises ADN, j’ai raconté une histoire invraisemblable, montée de toutes pièces, je me suis dit qu’ils verraient forcément les incohérences.» »
http://www.slate.fr/lien/50541/pourquoi-innocents-avouent-justice
Je terminerai en rappelant que la commission d’enquête s’est vu interdir de procéder aux interrogatoires des prétendus comploteurs en détention, au premier rang desquels Khaled Sheikh Mohammed – « cerveau » présumé des attentats.
Ainsi, toutes les déclarations que le rapport final attribue à ces détenus sont exclusivement des informations de troisième main transmises à la Commission par la CIA. Comme le reconnaissent Kean et Hamilton, la Commission n’avait « aucun moyen de vérifier la fiabilité des informations [...] fournies » (T. Kean et L. Hamilton, 2006, p.119). Or, c’est sur la base des aveux de Khaled Sheikh Mohammed et des autres détenus – « les seules sources disponibles sur le complot » (T. Kean et L. Hamilton, 2006, pp. 118/119) – que la Commission a pu établir un lien entre al-Qaida, Ben Laden et les attentats du 11 Septembre (Commission sur le 11/9, rapport officiel, juil. 2004, pp.145-155).
Plus d’infos ici :
http://www.reopen911.info/11-septembre/le-gouvernement-bush-s-est-oppose-a-ce-qu-une-enquete-ait-lieu-sur-les-attentats-du-11-septembre/
Pourquoi personne n’a pensé à torturer Bush, Rumsfeld, Rice, Cheney et consors, pour savoir s’ils plaideraient coupables sur le 11 septembre ? Je suis sûr que seulement 5 minutes de waterboarding auraient suffi à prouver leur culpabilité.
Torture et moralité sont deux mots qui ne peuvent coexister ensemble. Se réclamer de l’un annihile du même coup toute usage de l’autre. Mais combien sont les américains qui s’en soucient ?
Je préfère être un « vieil européen » que porter la honte insoutenable de l’inhumaine arrogance de mon pays.
Guantanamo est une humiliation permanente pour la condition humaine toute entière.
Mais malgré cela pour les américains, deux mandats d’un prix Nobel de la Paix, en plein XXIème siècle, et malgré des scandales répétés d’erreurs outrageantes, n’auront pas soulevé la moindre indignation générale.
Paradoxalement, le pays qui nous a sauvé de l’inhumanité des camps de concentration a succombé à en aiguiser encore davantage les méthodes.
Et, comble de l’horreur, aujourd’hui des gens mangent du pop-corn en salle pour assoir définitivement la banalisation de ces pratiques, dont aucune espèce terrestre n’est capable.
@Fabrice :
Cet article au titre évocateur « Il faut torturer DSK ! »devrait vous plaire :
http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/il-faut-torturer-dsk-105620
:)
Selon tout ce que j’ai lu, j’en ai conclu que Ben Laden était mort d’une grave maladie rénale fin 2001. De plus, à force de nous montrer des films, américains pour la plupart, où l’on constate que l’on peut voir vos amygdales rien qu’en téléphonant via satelite. Je suis désolée mais je n’ai jamais cru au scénario que l’on nous a servis concernant la traque de BEN LADEN. Aussi, pour moi, ce film ne présente que peu d’intérêt. Mais ce n’est que mon avis. Une invisible ; JBL1960
Tout a fait d’accord avec JBL1960.
En conclusion, Ils ont utilisé la torture pour les aveux de ces gens qui ont êtes surement compromis dans le scénario ‘Al Qaïda-Ben Laden’ comme future bouc-émissaires responsable du 11 septembre et ce film a ete crée pour renforcer, faire croire a la mort de Ben Laden sous le 1er mandat d’Obama… Surtout qu’ils n’ont jamais montré les photos et videos de cette « opération »… pour ne pas énerver les parties adverses !? Mais on autorise un film grand publique qui coûte des millions !!!!!