Le 11/9 mentionné dans le livre « Pétrole : la fête est finie ! » de Richard Heinberg
Richard Heinberg est cet expert américain qui au sein de l’ASPO (Association for the Study of Peak Oil) étudie le phénomène de la déplétion pétrolière (mais aussi gazière et du charbon), c’est-à-dire l’épuisement des ressources en énergies fossiles dans le monde, et son impact – immense – sur nos économies. En octobre 2008 est parue la version française de son livre Pétrole: la fête est finie !, qui a rapidement obtenu des recensions très favorables en France, à commencer par celle de M. Yves COCHET, député de Paris, ancien ministre de l’Environnement, qui déclare : "Le livre de Richard HEINBERG est le premier ouvrage complet sur le pic pétrolier que j’ai lu. Il est complet au sens où il ne se cantonne pas aux seuls aspects techniques du problème, mais en aborde toutes les dimensions économique, sociale, géopolitique et philosophique", ou encore M. Pierre Lance, rédacteur en chef de L’Ere nouvelle : "L’ouvrage le plus important de ces 40 dernières années".
Récemment, M. Nicolas Hulot évoquait Richard Heinberg comme "l’un des auteurs qui l’inspiraient"…
Dans le chapitre 3 de son ouvrage, R. Heinberg revient longuement sur les événements du 11 Septembre et nous livre son analyse géopolitique où figure en bonne place la question de l’accès aux ressources pétrolières dans le monde. En voici un court extrait…
Les atrocités du 11 septembre 2001 ont tellement dominé l’actualité mondiale, la politique, les affaires militaires et l’économie que le débat public a rapidement divisé toute l’histoire récente en deux catégories : l’« avant » et l’ « après » 11 Septembre. Pour la plupart des États-uniens, les événements furent non seulement horrifiants, mais de plus totalement imprévus. Étant donnée l’origine moyen-orientale attribuée aux terroristes, beaucoup soupçonnèrent que le pétrole y était mêlé d’une façon ou d’une autre.
Quinze des 19 pirates de l’air furent décrits comme des ressortissants saoudiens. Les autorités états-uniennes identifièrent le cerveau de l’attaque comme étant Oussama ben Laden, membre de l’une des familles les plus riches d’Arabie saoudite et entretenant des liens financiers de longue date avec celle des Bush : les ben Laden avaient, par un intermédiaire, aidé à financer la première entreprise commerciale de George W. Bush, Arbusto Energy Company, en 1979. Oussama, selon ses propres affirmations rapportées par la presse, considérait la présence de bases militaires états-uniennes sur le sol d’Arabie saoudite comme un affront à l’Islam.
En tant que premier producteur mondial de pétrole, le royaume saoudien était demeuré un allié fidèle des États-Unis depuis des décennies, mais sa population jeune et croissante et ses revenus pétroliers en baisse commençaient à susciter le mécontentement populaire. La famille royale saoudienne tenta de dissuader toute forme d’opposition islamiste en soutenant officiellement la secte ultraconservatrice wahhabite et en permettant que des sommes considérables de pétrodollars servent au financement de groupes islamistes radicaux, que certains qualifieraient de terroristes, à la fois à l’intérieur et à l’extérieur des frontières du pays. Les récentes administrations états-uniennes avaient accepté de fermer les yeux sur ces versements en contrepartie de la coopération saoudienne pour maintenir le prix du baril à un niveau stable.
Pour leur part, les autorités états-uniennes manipulaient les mouvements islamistes radicaux depuis plusieurs décennies. En Afghanistan durant les années 1980, puis dans les Balkans et en Tchétchénie dans les années 1990, les États-Unis avaient secrètement armé et financé des réseaux terroristes islamistes afin de déstabiliser des nations leur posant problème. Cette tactique connut des succès spectaculaires contre l’URSS, dont le déploiement militaire désastreux visant à maintenir sous contrôle l’Afghanistan voisin s’avéra être l’un des principaux facteurs menant à la disparition de l’Empire soviétique. Si toutefois les radicaux islamistes étaient disposés à accepter des armes et des dollars, ils ne nourrissaient en revanche spontanément aucune sympathie pour les intérêts états-uniens.
De façon assez ingénieuse, à partir du milieu des années 1990 la communauté états-unienne du renseignement utilisa les provocations islamistes à son avantage en agitant la menace du « terrorisme »1 islamiste radical de manière à ce que la population accepte des augmentations de budgets militaires et sécuritaires, et pour obtenir toujours plus de prérogatives pour la surveillance, les détentions extrajudiciaires et autres suspensions des libertés civiles.
Oussama ben Laden fut, durant l’essentiel des années 1980, un personnage clé du mouvement islamiste soutenu par les États-Unis. Quand exactement ceux-ci ont-ils cessé de financer ses activités, cela reste flou. La Libye fut, en 1994, le premier pays à demander son arrestation. Suite à deux attaques terroristes contre les intérêts états-uniens dans les années 1990, auxquelles Bill Clinton, alors Président, réagit en promettant une récompense pour la capture de ben Laden, ce dernier transféra ses quartiers généraux en Afghanistan, où il entraînait ses agents d’al-Qaïda dans des bases secrètes dont beaucoup avaient été aménagées ou construites par la CIA dans les années 1980.* <http://us.mg2.mail.yahoo.com/dc/blank.html?bn=1096.40&.intl=us#_ftn1>
La réponse de l’administration Bush aux attaques du 11 septembre 2001 fut de bombarder l’Afghanistan, de chasser le régime taliban du pouvoir et d’installer à sa place un gouvernement intérim docile.
Quelques commentateurs soulignèrent que l’Afghanistan était situé non loin des réserves stratégiques de pétrole et de gaz de la mer Caspienne, spéculant sur le fait que la guerre puisse constituer une tentative d’imposer la construction d’un gazoduc traversant le pays jusqu’aux ports pakistanais. Deux journalistes d’investigation français, Jean-Charles Brisard et Guillaume Dasquié, allèrent jusqu’à affirmer que l’intervention états-unienne avait été prévue, sinon organisée, plusieurs mois avant le 11 Septembre, comme en attestaient les menaces qui auraient été proférées à l’encontre des représentants talibans lors des négociations sur le gazoduc. Selon Brisard et Dasquié, lors d’une rencontre à Islamabad, en août 2001, entre Christina Rocca, chargée d’affaires pour l’Asie centrale auprès du gouvernement états-unien, et l’ambassadeur taliban au Pakistan, ce dernier se vit préciser : « Ou bien vous acceptez notre offre d’un tapis d’or, ou bien nous vous enterrerons sous un tapis de bombes ».
D’autres, et parmi eux certains appartenant à l’industrie pétrolière, mirent en doute la supposition que l’enjeu de la guerre puisse être principalement le pétrole et le gaz, attirant l’attention sur le fait que l’Afghanistan n’était pas en lui-même une pièce essentielle dans la domination des ressources énergétiques dans la région, et qu’en outre le projet de gazoduc n’engendrerait pas de retombées économiques importantes pour les États-Unis. Ainsi, à la fois les mobiles ostensibles et les mobiles réels des États-Unis auraient été simplement la poursuite de ben Laden et de son organisation.
Si la plupart des gens semblent être convaincus par ces derniers arguments, quelques points importants méritent tout de même d’être soulignés : en dehors du pétrole, les États-Unis n’ont pas beaucoup d’autres intérêts au Moyen-Orient. Ben Laden, pour sa part, ne se serait jamais résolu à détruire des symboles du pouvoir économique et militaire états-unien, si ce n’est en raison de l’engagement des USA au Moyen-Orient (et plus spécifiquement en Arabie saoudite). Dans cette optique, si les violences eurent lieu en Afghanistan, à New York et à Washington, les véritables objectifs stratégiques de toutes parts avaient beaucoup à voir avec l’Arabie saoudite. De surcroît, il s’est avéré que les enquêtes du FBI sur al-Qaïda avant le 11 Septembre avaient été systématiquement entravées par des ordres émanant des plus hauts niveaux du gouvernement états-unien, peut-être dans le but de détourner le regard des enquêteurs de certains membres de la famille royale saoudienne et de celle ben Laden, qui soutenaient financièrement Oussama depuis des années.3
Ainsi, dans tous les cas les ressources énergétiques sont au cœur du conflit. En outre, la guerre d’Afghanistan impliquait la construction de bases états-uniennes permanentes un peu partout en Asie centrale, ce qui, dans l’hypothèse où les dirigeants US ont vraiment agi dans l’objectif de contrôler la future exploitation des ressources en pétrole et gaz de la Caspienne, se révèlerait d’une utilité considérable.
L’administration Bush proclama très vite que la campagne d’Afghanistan n’était que le début de sa « guerre contre le terrorisme », et ses responsables faisaient circuler des listes de potentielles cibles additionnelles comprenant de 3 à près de 50 nations. Les critiques de la doctrine Bush affirmèrent que l’administration avait, dans les faits, déclaré la guerre à une grande partie du reste du monde. La plupart des nations mentionnées dans ces listes possédaient d’importantes ressources pétrolières tandis que beaucoup d’autres, dont l’Iran et l’Irak y figurant en bonne place, n’avaient que peu ou pas du tout de relations avec ben Laden ou al-Qaïda. Avec le « terrorisme » comme ennemi apparent mais insaisissable, l’administration états-unienne paraissait s’engager dans le projet grandiose d’utiliser sa puissance militaire pour s’implanter dans des zones stratégiques du globe, et peut-être pour prendre le contrôle intégral et direct des ressources pétrolières mondiales.
Prochaine étape, la Mésopotamie
Peu après l’invasion de l’Afghanistan, l’administration Bush tourna son regard vers l’Irak, affirmant que ce pays violait les résolutions de l’ONU et qu’il abritait les organisateurs des attentats du 11 Septembre ou collaborait avec eux. En réponse, Saddam Hussein rouvrit ses portes aux inspecteurs de l’ONU qui sillonnèrent le pays pour y trouver des armes prohibées. Les responsables états-uniens poursuivirent l’escalade rhétorique. Selon les propres mots du Vice-président Dick Cheney : « Il ne fait pas de doute que Saddam Hussein possède actuellement des armes de destruction massive ». Une invasion préventive était justifiée et nécessaire puisque, selon Condoleezza Rice : « Nous ne voulons pas que les preuves du crime se transforment en champignon atomique ». Cheney tentait également d’associer le régime irakien aux organisateurs du 11 Septembre en qualifiant Bagdad de havre pour terroristes. Les responsables politiques états-uniens voulaient signifier clairement que, avec ou sans soutien international, ils entendaient envahir l’Irak et renverser son dirigeant.
Extrait de l’ouvrage de Richard Heinberg, "Pétrole : la fête est finie" paru aux Editions Demi Lune
Notes ReOpenNews: M. Heinberg apparaît également dans le film documentaire Pétrole et écrans de fumée de Ronan Doyle, bientôt disponible en DVD.
Rien de nouveau.
Le lien 9/11 et géo-politique du pétrole a commencé à circuler peu après les attaques.
Thierry Meyssan le souligne déjà en 2002 dans « L’Effroyable Imposture ».
Bon résumé et vulgarisation pour les retardataires.
Rien de nouveau, c’est vrai, mais piqûre de rappel toujours utile, surtout quand elle s’ajoute aux autres.
Cela dit, des gens aussi compétents et avertis que Richard Heinberg (ou Eric Laurent) pourraient quand même avoir le courage d’aller jusqu’au bout de leur démonstration et de leur analyse en franchissant le cap suivant, qui coule pourtant de source : que ceux à qui le crime profite tellement sont probablement ceux qui l’ont commis ou l’ont laissé commettre.
Pourquoi se gardent-ils toujours de franchir ce Rubicon-là ? Cela ne demande pourtant que quelques pas de plus, et il n’y a que le premier qui coûte.
Peut-être parce qu’un mobile n’est pas une preuve…
Un « faisceau de présomptions graves, précises et concordantes » a valeur de preuve, au moins dans le droit français.
Et le moins qu’on puisse dire à propos du 11/9, c’est que ces trois adjectifs s’appliquent parfaitement aux présomptions concernant une complicité active.de l’Administration américaine ou de ses deux bras armés, militaires et services secrets.
Heinberg a aussi écrit Peak Everything. On peut espérer que ce nouveau livre soit différent. La position de Heinberg y était en effet très ambigüe: il faut ni plus ni moins que la justice dépende de l’écologie. Sous couvert de réalisme, l’auteur remet au goût du jour un certain malthusianisme:
« If we want peace, democracy, and human rights, we must work to create the ecological condition essentiel for these things to exist: i.e., a stable human population at – or less than – the environment’s long-term carrying capacity. » (2007, p. 121)
« Si nous voulons la paix, la démocratie et le respect des droits de l’homme, nous devons travailler à créer la condition essentielle qui rende cela possible, c’est-à-dire une population humaine stabilisée au niveau – ou en-dessous – des capacités de l’environnement à long terme. »
Bien qu’il ne défende pas un déterminisme écologique absolu comme Stanton semble le faire – je vais y venir – Heinberg espère que les sociétés sauront faire des choix raisonnables avant que la nature elle-même s’en charge ou que des régimes fascistes l’imposent. Il y a urgence, dit l’auteur:
« The longer we put off choosing the nicer methods of achieving demographic stability, the more likely the nasty ones become, wether imposed by nature or by some fascistic regime. »
Que disait donc Stanton? Heinberg rapporte ses propos controversés, parus initialement dans la newsletter de l’ASPO de juillet 2005 (un article intitulé « Oil and people »):
« L’immigration est bannie. Les immigrants sans autorisation sont traités comme des criminels. Chaque femme n’est autorisée à élever qu’un seul enfant qui doit être bien portant. Aucune exception culturelle ou religieuse n’est admise, mais les autorisations peuvent se monnayer. L’avortement ou l’infanticide est obligatoire s’il s’avère que le foetus ou le bébé est handicapé (la sélection darwinienne se débarasse des inadaptés). Quand à un âge avancé un accident ou une maladie fait de l’individu plus un fardeau qu’un apport pour la société, sa vie est décemment arrêtée. L’euthanasie volontaire est légale et facilitée. L’emprisonnement est exceptionnel, remplacé par des châtiments corporels pour des moindres délits et par la peine de mort pour les délits graves. »
[Immigration is banned. Unauthorised arrives are treated as criminals. Every woman is entitled to raise one healthy child. No religious or cultural exceptions can be made, but entitlements can be traded. Abortion or infanticide is compulsory if the fetus or baby proves to be handicapped (Darwinian selection weeds out the unfit). When, through old age, accident or disease, an individual becomes more of a burden than a benefit to society, his or her life is humanely ended. Voluntary euthanasia is legal and made easy. Imprisonment is rare, replaced by corporal punishment for lesser offences and painless capital punishment for greater.]
(Heinberg citant Stanton, Peak Everything, 2007, p. 118)
Et Heinberg de rajouter que Stanton ne fait pas partie des partisans des solutions fascistes:
« The proponents of fascistic « solutions » (I’m not suggesting that Stanton is in this category, by the way) are likely to justify their calls, etc. » (p. 122)
By the way?
@ Loïc
vous n’avez pas traduit cette phrase, ô combien importante,
“The longer we put off choosing the nicer methods of achieving demographic stability, the more likely the nasty ones become, wether imposed by nature or by some fascistic regime.”
le le fais donc pour vous:
» Plus nous reportons le choix de méthodes douces pour arriver à une stabilité démographique, plus il est probable qu’émergent les solutions affreuses (odieuses, insupportables…) qu’elles soient imposées par la nature ou par quelque gouvernement fasciste. »
Merci à vous de ne pas faire de M. Heinberg un néo-nazi eugéniste ou je ne sais quel avocat de solutions fascisantes. Car M. Heinberg se situe à l’exact opposé de ce spectre, et donner à penser le contraire est lui faire un bien mauvais procès en sorcellerie. Pire, c’est de la calomnie en bonne et due forme.
EDL
Lisez ce livre et vous n’aurez aucun doute que l’auteur est un humaniste plein de compassion non seulement pour ses semblables (l’espèce humaine) mais pour toute forme de vie sur terre … Cela semble quelque peu angélique, mais ça ne l’est pas quand on comprend que toute espèce appartient à la biosphère laquelle est basée sur l’harmonie ou à tout le moins l’équilibre.
Il va sans dire que si tel n’avait pas été le cas, je n’aurais pas choisi de l’éditer en français.
« L’air est précieux à l’homme rouge, car toutes choses partagent le même souffle – la bête, l’arbre, l’homme, ils partagent tous le même souffle. L’homme blanc ne semble pas remarquer l’air qu’il respire. Comme un homme qui met plusieurs jours à expirer, il est insensible à la puanteur…[…]
Nous sommes une partie de la terre, et elle fait partie de nous. Les fleurs parfumées sont nos sœurs; le cerf, le cheval, le grand aigle, ce sont nos frères. Les crêtes rocheuses, les sucs dans les prés, la chaleur du poney, et l’homme – tous appartiennent à la même famille.[… )
La terre n'appartient pas à l'homme, l'homme appartient à la terre. Cela, nous le savons. Toutes choses se tiennent comme le sang qui unit une même famille. Toutes choses se tiennent[…]
Tout ce qui arrive à la terre, arrive aux fils de la terre. Ce n’est pas l’homme qui a tissé la trame de la vie : il en est seulement un fil. Tout ce qu’il fait à la trame, il le fait à lui-même. »[…]
Nuire à la terre, c’est accabler de mépris son créateur.
Les blancs aussi disparaîtront ; peut-être plus tôt que toutes les autres tribus. Contaminez votre lit, et vous suffoquerez une nuit dans vos propres détritus…
Mais en mourant vous brillerez avec éclat, ardents de la force du Dieu qui vous a amenés jusqu’à cette terre et qui pour quelque dessein particulier vous a fait dominer cette terre et l’homme rouge.
« La fin de la vie et le début de la survivance… »
Chef indien Seattle, 1854