Ambitions anglo-américaines derrière l’assassinat de Benazir Bhutto et déstabilisation du Pakistan
Par Larry Chin, Global Research, le 29 décembre 2007
Pour semer le chaos, un prétexte
« Apporter la démocratie au monde musulman » c’est la rhétorique Orwellienne utilisée pour masquer l’utilisation par Bush-Cheney de la pression et de la force, leur tentative dramatique de modifier le gouvernement pakistanais pour en faire une coalition Bhutto/Sharif – Musharraf, et les plans en coulisse pour une intervention militaire. Différents plans de déstabilisation américains, connus de responsables et d’analystes, proposaient de renverser le pouvoir militaire au Pakistan.
L’assassinat de Bhutto semble avoir été anticipé. On a même rapporté qu’il y avait eu des « bavardages » parmi les responsables US sur de possibles assassinats, soit de Pervez Musharraf soit de Benazir Bhutto, bien avant que les tentatives récentes n’aient eu lieu.
Comme Jeremy Page l’a succinctement résumé dans son article
« Qui a tué Benazir Bhutto ? Les principaux suspects« , les principaux suspects sont :
1) « des militants pakistanais et étrangers islamistes qui voyaient en elle une hérétique et un larbin des américains » et
2) L’ISI (Inter-Services Intelligence – services secrets pakistanais ndlt), en fait une branche de la CIA. Le mari de Bhutto Asif Ali Zardari a accusé l’ISI d’avoir été impliqué dans l’attaque d’octobre.
L’assassinat de Bhutto a été comme prévu imputé à « Al Qaeda » sans qu’on mentionne le fait qu’Al Qaeda elle- même est une opération des services de renseignements anglo américains.
L’article de Page a été l’un des premiers à nommer l’homme qui a maintenant été visé comme étant le principal suspect : Baitullah Mehsud, un prétendu militant Taliban combattant l’armée pakistanaise à partir du Waziristan. Des rapports conflictuels établissent un lien entre Mehsud « Al Qaeda », le Taliban Afghan, et le Mullah Omar. D’autres analystes établissent un lien entre lui et le terroriste A.Q. Khan.
Le profil de Mehsud et la façon dont on parle de lui font écho à la manière dont la propagande traite tous les « terroristes » post 11 septembre. Ceci renvoie à son tour aux questions habituelles sur l’implication de la propagande des services secrets anglo –américains. Est –ce que Mehsud est lié au ISI ou à la CIA ? Que connaissaient la CIA et l’ISI sur Mehsud ? Plus important, est ce que Mehsud, ou la manipulation de la propagande l’entourant, fournit à Bush-Cheney un prétexte pour une agression future dans la région ?
Propagande classique de la guerre contre le terrorisme
Alors que des détails de l’assassinat de Bhutto continuent d’être révélés, ce qui est clair c’est que c’était un coup politique, du même type que celui de l’agent US Rafik Hariri au Liban. Comme le coup très suspect d’Hariri, l’assassinat de Bhutto a été décrit par les médias de masse comme étant le martyr d’une grande messagère de la « démocratie » à l’Occidentale. Pendant ce temps, les actions brutales dans les coulisses du gouvernement US ont reçu peu d’attention.
Le 28 décembre 2007, la manière dont le New York Times a couvert l’assassinat de Bhutto offre l’exemple parfait de la distorsion Orwellienne par les medias de masse dissimulant, derrière l’écran de fumée de la propagande, de manière flagrante, la vérité sur l’agenda de Bush-Cheney. Cet article fait écho à la rhétorique de la Maison Blanche proclamant que les principaux objectifs de Bush sont d’ »amener la démocratie au monde musulman » et « de chasser les militants islamistes ».
En fait, l’administration ouvertement criminelle de Bush – Cheney n’a seulement soutenu et promu que l’antithèse de la démocratie : chaos, fascisme, et l’installation de régimes fantoches amis des anglo américains.
En fait, la géostratégie centrale et constante de Bush-Cheney, et de leurs homologues – élites partout dans le monde, c’est d’imposer continuellement et d’étendre la « guerre contre le terrorisme » fabriquée ; continuer la guerre à travers le continent eurasien, avec des évènements déclenchés par des opérations sous faux pavillon, et des prétextes fa briqués.
En fait, les principaux outils utilisés dans la « guerre contre le terrorisme » reste les militants islamistes, travaillant pour le compte des agences de renseignements militaires anglo américains – parmi eux « Al Qaeda », et l’ISI au Pakistan. Mehsud rentre dans ce profil.
Sauver la Pakistan de Bush-Cheney
Dans une citation du même article du NYT, Wendy Chamberlain, l’ancien ambassadeur US au Pakistan (et un personnage central derrière les efforts multinationaux pour construire un pipeline trans-afghan, en lien avec le 11 septembre) déclare fièrement : « Nous sommes acteurs dans le système politique pakistanais. »
Non seulement les US ont continué à être « acteur » mais l’un des dirigeants au sommet pendant des décennies.
Chaque dirigeant pakistanais depuis le début des années 90 – - – Bhutto, Sharif, et Musharraf – - – se sont soumis aux intérêts de l’Occident. L’ISI est en fait une branche de la CIA.
Tandis que Musharraf a été, et reste, un homme fort pour Bush-Cheney, des questions sur sa « fiabilité » et le contrôle – à la fois le contrôle du régime sur la populace et sur l’agitation populaire croissante, et le contrôle de l’élite sur son régime – - – sont à l’origine des tentatives de pression maladroites de Bush – Cheney pour la mise en place d’un gouvernement de partage de pouvoir (pro US du type irakien). Comme l’a noté Robert Sheer, Bush-Cheney ont joué à « la Roulette Russe » avec Musharraf, Bhutto et Nawaz Sharif – - – chacun d’entre eux ayant été l’avant-garde consentante et profondément corrompue des US.
Le retour à la fois de Bhutto et de l’autre ancien premier ministre, Nawaz Sharif, a simplement été une tentative des US pour couvrir ses paris sur les pouvoirs régionaux.
Qu’est ce que John Negroponte et Condoleeza Rice mettaient vraiment en place ces derniers mois ?
Qui profite de l’assassinat de Bhutto ? La « guerre contre le terrorisme » l’environnement géostratégique et de propagande, le projet d’imposer une guerre permanente mondiale utilisé par les intérêts de l’élite après le 11 septembre, tout ceci bénéficie clairement de l’assassinat de Bhutto. Bush-Cheney et leurs homologues également complices, pro guerre/pro occupation, au sein du parti Démocrate qui soutiennent avec enthousiasme l’utilisation routinière du mot « terreur », prétexte pour imposer une politique de guerre continuelle.
Sont de nouveau la cible de la rhétorique politique de Washington, l’énoncé : peur, « terrorisme », « sécurité » et force militaire, et cela fait également partie du barrage médiatique 24h sur 24.
Les candidats à la présidentielle US de 2008 et leurs élites de conseillers pour la campagne, tous sans exception soutenant avec enthousiasme la « guerre contre le terrorisme », ont, chacun à leur tour, présenté leur version respective de la rhétorique « nous devons stopper les terroristes »devant leurs supporters confus. Les candidats dont les sondages chutaient, avec à leur tête le participant au 11 septembre l’opportuniste Rudy Guiliani, et le faucon néo libéral Hillary Clinton, ont déjà bénéficié d’une nouvelle vague de frayeur de masse.
Musharraf profite de la disparition d’une rivale sérieuse, mais doit maintenant trouver une manière de rétablir l’ordre. Musharraf a maintenant une justification idéale pour réprimer les « terroristes » et imposer totalement la loi martiale, avec Bush-Cheney travaillant dans l’ombre derrière Musharraf – - – continuant de manipuler ou de remplacer son appareil, si Musharraf s’avère être trop peu fiable ou incapable de satisfaire les plans de Bush-Cheney.
On ne peut pas sous estimer la probable implication de l’ISI derrière le coup contre Bhutto. Le rôle de l’ISI derrière chaque acte majeur de « terrorisme » depuis le 11 septembre, reste la vérité centrale non dite derrière les réalités actuelles géopolitiques. Ni Sharif ni Musharraf, mais Bhutto, aurait menacé les agendas de l’ISI.
Bhutto, L’Islam militant et les Pipelines.
Maintenant qu’elle est devenir martyr, de nombreux faits historiques peu flatteurs sur Benazir Bhutto seront cachés et oubliés.
Bhutto elle –même a été intimement impliquée dans la création du milieu de la vraie « terreur« intentionnellement responsable de son assassinat. Tout au long de sa carrière politique, elle a soutenu les militants Islamistes, les Talibans, l’ISI, et les ambitions des gouvernements occidentaux.
Comme l’a noté Michel Chossudovsky dans « la guerre contre le terrorisme »
de l’Amérique, c’est pendant le second mandat de Bhutto que Jamiat-ul-Ulema-e-Islam (JUI) et les Talibans ont accédé au pouvoir, accueilli dans le gouvernement de coalition de Bhutto. C’est à ce moment là que les liens entre le JUI l’armée et l’ISI ont été établis.
Alors que la relation de Bhutto avec à la fois l’ISI et les Talibans ont été mouvementées, c’est clair que Bhutto, alors qu’elle était au pouvoir, a soutenu les deux – - – et a soutenu avec enthousiasme les interventions anglo américaines.
Dans ses deux livres de référence, «Taliban: Militant Islam, Oil « et « Fundamentalism in Central Asia and Jihad: The Rise of Militant Islam in Central Asia, » Ahmed Rashid détaille amplement les connections du régime de Bhutto avec l’ISI, les Talibans, « l’Islam militant », les intérêts des multinationales du pétrole, et les responsables anglo américains et les agents des services de renseignement.
Dans Jihad, Rashid a écrit :
« Ironiquement, ce n’est pas l’ISI, mais la premier ministre Benazir Bhutto, la dirigeante la plus libérale, la plus séculière dans l’histoire récente du Pakistan, qui a donné le coup de grâce à une nouvelle relation avec l’Asie Centrale. Plutôt que de soutenir une processus de paix plus étendu en Afghanistan, Bhutto a soutenu les Talibans, dans le cadre d’une politique irréfléchie et présomptueuse pour créer un nouveau commerce tourné vers l’Occident et une route pour le pipeline du Turkménistan à travers le sud Afghanistan jusqu’au Pakistan, pour lequel les Talibans assureraient la sécurité. Bientôt l’ISI a soutenu cette politique parce que son protégé Afghan Gulbuddin Hekmatyar n’avait fait aucun progrès pour capturer Kaboul, et les Talibans semblaient être assez forts pour le faire. »
Sur les Talibans, Rashid a même fourni un détail historique :
«Quand Bhutto a été élue premier ministre en 1993, elle a ouvert une route à l’Asie Centrale. Une nouvelle proposition a émergé fortement soutenue par le transport pakistanais frustré et la mafia dirigeant la contrebande, le JUI et l’armée Pashtoun et les responsables politiques ».
« Le gouvernement de Bhutto a complètement soutenu les Talibans, mais l’ISI restait sceptique sur leurs capacités, convaincu qu’ils resteraient utiles mais comme force périphérique dans le sud. »
« Le Congrès US a autorisé un budget clandestin de 20 millions de dollars pour la CIA pour déstabiliser l’Iran, et Téhéran a accusé Washington de faire passer ces fonds aux Talibans – - – une accusation toujours niée par Washington. Bhutto a envoyé plusieurs émissaires à Washington pour presser les US d’intervenir plus publiquement en prenant partie pour le Pakistan et les Talibans. »
Une erreur de Bhutto : elle a soutenu avec véhémence le pipeline proposé par la compagnie pétrolière d’Argentine Bridas, et s’est opposée au pipeline d’Unocal (ayant la faveur des US). Ceci a contribué à ce qu’elle soit chassée du pouvoir en 1996, et au retour au pouvoir de Nawaz Sharif. comme l’a noté Rashid :
« Après la chute du gouvernement de Bhutto en 1996, le nouveau premier ministre élu Nawaz Sharif, son ministre du pétrole, Chaudry Nisar Ali Khan, l’armée et l’ISI ont complètement soutenu Unocal. Le Pakistan voulait un soutien plus direct des US pour les Talibans et a pressé Unocal de commencer rapidement la construction pour légitimer les Talibans. A la base, les US et Unocal ont accepté l’analyse et objectifs de l’ISI – - – que la victoire des Talibans en Afghanistan rendrait plus facile le travail d’Unocal et rendrait plus rapide la reconnaissance US. »
Sans nier son image attirante et pro occidentale, le réel bilan de Bhutto c’est celui de la corruption et de l’accommodation.
Dans la « guerre contre le terrorisme », chaque crime majeur géostratégique anglo américain a été précédé d’un prétexte arrangeant, orchestré et mené par des proxies « terroristes » directement ou indirectement connectés aux services de renseignement militaire US, ou manipulés pour agir comme atouts pour les renseignements. L’assassinat de Benazir Bhutto est simplement un exemple brutal de plus.
Ce fut le 11 septembre du Pakistan ; l’assassinat de JFK du Pakistan, et son impact résonnera pendant des années.
Contrairement aux informations colportées par les médias traditionnels, le chaos profite à la « guerre contre le terrorisme » de Bush-Cheney. Des appels pour « augmenter la sécurité dans le monde » paveront la voie à une réaction US musclée, une force menée par les US et d’autres formes pour « sévir » dans la région de la part de Bush Cheney. En d’autres termes, l’assassinat aide à faire en sorte que non seulement les US ne partiront pas mais qu’ils accroîtront leur présence.
L’élection pakistanaise, si elle a lieu, est un double choix plus simple : pro US Musharraf ou pro US Sharif.
Alors qu’on a des résultats mitigés concernant le succès de l’agenda de Bush –Cheney, et qu’il a rencontré une large palette de résistance (« terroristique » de même que politique) il n’y a aucun doute que les fondations de la « guerre contre le terrorisme » sont restées fermes, inébranlées et systématiquement réinforcées.
En ce qui concerne Nawaz Sharif qui émerge maintenant comme le seul rival de Musharraf, lui, comme Musharraf et Bhutto, est connu pour son accommodation aux intérêts anglo américains- – - pipelines, commerce, et la présence militaire continuelle US. Comme le note Jean Charles Brisard et Guillaume Dasquié dans le livre Forbitten Truth, le coup militaire d’octobre 1999, conduit par Musharraf, qui a renversé le régime de Sharif a été provoqué par l’animosité entre les deux camps, de même que la « corruption personnelle de Sharif et sa mégalomanie » et des « inquiétudes que Sharif se pliait avec trop d’empressement au son de la politique de Washington concernant le Cashmir et l’Afghanistan. »
En d’autres termes, Bush-Cheney gagnent, peu importe quel atout se retrouve sur le trône.
Traduction Mireille Delamarre pour www.planetenonviolence.org
Original: http://www.globalresearch.ca/index.php? … p;aid=7699
Dimanche 30 Décembre 2007
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