Le Pentagone des démocrates : la guerre est là mais elle ne se voit pas
Comme le prédisait l’écrivain Webster Tarpley lors d’une interview faite à la veille de l’arrivée au pouvoir de Barack Obama début 2009, le changement d’administration n’amènera pas de changement fondamental de la politique impérialiste américaine, si ce n’est un changement de style. Mr Tarpley pensait que les opérations secrètes seraient davantage utilisées pour compenser un moindre engagement dans les conflits dits "conventionnels". La réalité rejoint ses prévisions, mais en plus noir encore. Les deux conflits d’Afghanistan et d’Irak sont toujours d’actualité. L’Iran est de plus en plus dans la ligne de mire. Et les "opérations secrètes" se généralisent, échappant ainsi au contrôle du Congrès américain. Un tableau sombre que nous détaille cet article du Manifesto.
Le Pentagone des démocrates : la guerre est là mais elle ne se voit pas
paru sur mondialisation.ca, le 13 juin 2010. Article original Il Manifesto
La guerre n’est pas que celle qui se voit. En plus des opérations guerrières en Irak et en Afghanistan, le Pentagone conduit une guerre secrète où l’Iran est un des objectifs centraux. Elle est coordonnée par le Commandement des opérations spéciales (Ussocom), qui dispose d’environ 57000 spécialistes des quatre secteurs des forces armées. Leur mission officielle comprend : recueil d’informations sur l’ennemi ; action directe pour détruire des objectifs, éliminer ou capturer des ennemis ; guerre non conventionnelle conduite par des forces externes, entraînées et organisées par l’Ussocom ; contre-insurrection pour aider des gouvernements alliés à réprimer une rébellion ; opération psychologique pour influencer l’opinion publique étrangère afin d’appuyer les actions militaires états-uniennes. Comme il ressort d’une enquête du Washington Post, les forces pour les opérations spéciales sont aujourd’hui déployées dans 75 pays, par rapport à 60 il y a un an. Leur importance croissante est prouvée par le fait que « les commandants des forces spéciales sont aujourd’hui plus présents à la Maison-Blanche qu’ils ne l’étaient à l’époque de Bush ».
L’aire où se concentrent ces opérations, dont le financement se monte officiellement à 10 milliards de dollars, comprend le Moyen-Orient, l’Asie centrale et l’Afrique orientale. Il existe cependant « des plans d’attaques préventives ou de représailles dans de nombreux endroits du monde, à mettre en œuvre quand on découvre un complot ou après une attaque ». L’utilisation des forces pour les opérations spéciales offre l’ « avantage » de ne pas demander l’approbation du Congrès et de rester secrète. Ces opérations, selon des fonctionnaires de l’administration cités par l’agence Upi, « pourraient ouvrir la voie à des attaques militaires contre l’Iran si la confrontation sur le programme nucléaire de Téhéran se fait plus aiguë ».
Dans le cadre de la « guerre non-conventionnelle », l’Ussocom emploie des compagnies militaires privées, comme Xe Services (ex-Blackwater, connue pour ses actions en Irak) qui s’avère employée dans diverses opérations spéciales parmi lesquelles le recueil d’informations en Iran. Ici l’Ussocom soutient directement ou indirectement les groupes rebelles, surtout ceux qui sont dans la zone sud-orientale à majorité sunnite. Sans trop aller dans la nuance : un de ces groupes, les « Guerriers sacrés du peuple », figure dans la liste des organisations terroristes rédigée par Washington. La même politique est menée en Afghanistan, où les forces pour les opérations spéciales se servent de seigneurs de la guerre locaux. L’un de ceux-ci –rapporte le New York Times- est Matiullah Khan : avec son armée privée, il combat les insurgés avec les forces spéciales états-uniennes (dont le quartier général est à une centaine de mètres de celui de Matiullah Khan) et assure le transit des convois de l’OTAN, qui lui verse un paiement de 1.200 dollars par camion. Il est ainsi devenu, dans sa province, le plus puissant et le plus riche seigneur de la guerre. Grâce à ce que le Pentagone appelle une « guerre non-conventionnelle ».
Edition de jeudi 10 juin de il manifesto
Traduit de l’italien par Marie-Ange Patrizio
Notes ReOpenNews : En lien avec cet article
- 18 janvier 2009 | ReOpenNews + Vidéo | Interview de l’écrivain Webster G. Tarpley : Les hommes derrière Obama (transcription & traduction ReOpenNews)
et aussi
- 4 juin 2010 | New York Times | Le Pentagone sommé d’économiser plusieurs milliards de dollars pour contribuer aux dépenses de guerre (traduction ReOpenNews)
- 16 décembre 2009 | Infowars | Webster Tarpley : Obama déclare la guerre au Pakistan (traduction ReOpenNews)
- 23 décembre 2009 | AFP | Le Congrès américain débloque 680 milliards pour l’armée
One Response to “Le Pentagone des démocrates : la guerre est là mais elle ne se voit pas”
Trackbacks